J\u2019ai un handicap de naissance, je suis infirme moteur c\u00e9r\u00e9bral, et n\u2019ai pas l\u2019usage de la parole ni le contr\u00f4le de mes mouvements.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Je suis honor\u00e9 de vous partager mon exp\u00e9rience scolaire et universitaire, mais aussi plus largement mon analyse de cet aspect de la vie des personnes en situation de handicap.\u00a0<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Je crois profond\u00e9ment que nous assistons \u00e0 l\u2019\u00e9mergence d\u2019une g\u00e9n\u00e9ration nouvelle de personnes en situation de handicap, et de personnes dites valides, qui ont \u00e0 coeur de r\u00e9unir nos deux mondes dans des projets d\u2019avenir et porteurs de sens. Je me r\u00e9jouis d\u2019\u00eatre un des repr\u00e9sentants de cette g\u00e9n\u00e9ration et de vous transmettre mes convictions profondes.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Ma scolarit\u00e9 a d\u00e9but\u00e9 dans un IEM,\u00a0 \u00e0 Neuilly, au sein duquel j\u2019ai pu d\u00e9velopper mes capacit\u00e9s intellectuelles et d\u2019apprentissage. Ces ann\u00e9es ont \u00e9t\u00e9 une lib\u00e9ration pour moi, avec la d\u00e9couverte de l\u2019alphabet et d\u2019un mode de communication qui est, encore aujourd\u2019hui, au c\u0153ur de mon rapport au monde. J\u2019ai eu la chance de pouvoir int\u00e9grer par la suite le lyc\u00e9e Toulouse Lautrec \u00e0 Vaucresson, qui allait m\u2019accueillir pendant les 12 ann\u00e9es suivantes. Cet endroit a \u00e9t\u00e9 pour moi, d\u2019une part, un lieu d\u2019\u00e9panouissement privil\u00e9gi\u00e9 et d\u2019autre part un terrain d\u2019exp\u00e9rimentations et de r\u00e9flexion quant \u00e0 mes possibilit\u00e9s intellectuelles et d\u2019action. J\u2019y ai fait l\u2019exp\u00e9rience du meilleur comme du pire, et en relisant ces ann\u00e9es aujourd\u2019hui j\u2019identifie l\u2019accompagnement comme \u00e9tant un point cl\u00e9 de mon \u00e9panouissement. Pour ce dernier, je suis tributaire de la sensibilit\u00e9 des personnes qui sont \u00e0 mes c\u00f4t\u00e9s, ce qui peut donner, au mieux une belle collaboration et au pire une cohabitation potentiellement douloureuse ! J\u2019ai par exemple refus\u00e9 l\u2019accompagnement exclusif par une personne retrait\u00e9e b\u00e9n\u00e9vole. Il \u00e9tait essentiel pour moi de garder une relation d\u2019accompagnement avec les \u00e9ducateurs et les surveillants du lyc\u00e9e, plus habitu\u00e9s \u00e0 ma situation. J\u2019ai pu \u00eatre accompagn\u00e9 par une personne \u00e0 plein temps, en lien avec l\u2019\u00e9quipe \u00e9ducative et les professionnels param\u00e9dicaux du lyc\u00e9e, ce qui a repr\u00e9sent\u00e9 une vraie chance pour moi ! Les 12 ann\u00e9es pass\u00e9es dans cet \u00e9tablissement m\u2019ont aid\u00e9 \u00e0 mieux me conna\u00eetre.\u00a0 J\u2019ai compris que j\u2019aurai toujours besoin d\u2019une \u00e9quipe autour de moi pour assurer mon accompagnement, et que la confiance r\u00e9ciproque \u00e9tait un facteur essentiel de mon \u00e9panouissement et de mon sentiment de s\u00e9curit\u00e9. Pourtant, ce lieu si b\u00e9n\u00e9fique pour mon parcours s\u2019est transform\u00e9 en un dur rappel \u00e0 la r\u00e9alit\u00e9 de la fin des ann\u00e9es 90\u2026 Je croyais pouvoir passer mon Bac en un an, comme les personnes dites valides, ce qui s\u2019est av\u00e9r\u00e9 impossible pour des raisons d\u2019organisation. J\u2019ai trouv\u00e9 par mes propres moyens et obtenu un DAEU, \u00e9quivalent du dipl\u00f4me du Bac, ce dernier ne pouvant absolument pas \u00eatre am\u00e9nag\u00e9 \u00e0 l\u2019\u00e9poque. Je garde un souvenir douloureux de cette fin de lyc\u00e9e, qui a \u00e9t\u00e9 pour moi un v\u00e9ritable parcours du combattant. J\u2019ai r\u00e9ussi \u00e0 obtenir de rester une ann\u00e9e suppl\u00e9mentaire au lyc\u00e9e Toulouse Lautrec malgr\u00e9 les r\u00e9ticences de l\u2019\u00e9tablissement, afin de pr\u00e9parer au mieux mon dipl\u00f4me dans un environnement familier.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Pendant toute cette derni\u00e8re ann\u00e9e, j’ai aussi pu pr\u00e9parer avec mon \u00e9ducateur-r\u00e9f\u00e9rent mon arriv\u00e9e dans mon futur foyer et \u00e0 l’Universit\u00e9 Nancy 2. A la fin de l’ann\u00e9e scolaire, j’ai m\u00eame pu faire une semaine de “stage” dans ce foyer,\u00a0 accompagn\u00e9 les deux premiers jours par mon \u00e9ducateur-r\u00e9f\u00e9rent de Vaucresson pour apprendre certains gestes de la vie quotidienne aux professionnels de Nancy.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Ayant obtenu mon D A E U,\u00a0 avec mention, j’ai pu m’inscrire en sociologie en premi\u00e8re ann\u00e9e de Licence.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Mon arriv\u00e9e \u00e0 L\u2019universit\u00e9 Nancy 2 a ouvert un nouveau chapitre dans le livre de ma vie. J\u2019\u00e9tais libre ! Libre d\u2019\u00e9tudier, de me d\u00e9placer et de nouer des liens. Mais pour une personne comme moi, une telle \u201clibert\u00e9\u201d prend des airs de prison ! La libert\u00e9 et l\u2019ind\u00e9pendance que beaucoup recherchent en entrant \u00e0 l\u2019universit\u00e9 m\u2019ont beaucoup d\u00e9boussol\u00e9,\u00a0 ayant besoin en permanence d\u2019une pr\u00e9sence et d\u2019un accompagnement. D\u00e8s ma visite de ce foyer pour \u00e9tudiants en situation de handicap, la directrice m’a bien dit qu’elle ne pourrait pas me mettre quelqu’un en permanence comme j’en avais l’habitude auparavant et que surtout, ce n’\u00e9tait pas la politique de cette structure qui voulait nous autonomiser le plus possible et nous permettre de poursuivre nos \u00e9tudes de fa\u00e7on ordinaire. Je n\u2019\u00e9tais donc que peu accompagn\u00e9 : le foyer nous mettaient \u00e0 disposition certains moyens humains pour le nursing et partiellement pour la prise de notes pendant les cours \u00e0 la fac, ce qui n\u2019\u00e9tait pas suffisant pour r\u00e9pondre \u00e0 mes besoins ! A ce sujet,\u00a0 une anecdote : au tout premier TD, comme tout \u00e9tait nouveau pour moi et que nous \u00e9tions en surnombre dans la petite salle de classe o\u00f9 avait lieu ce cours, mes mouvements involontaires ath\u00e9tosiques, d\u00fbs \u00e0 mon handicap physique, me donnaient des airs d\u2019Elvis Presley, les auxiliaires qui s\u2019occupaient de moi le matin ne serrant pas suffisamment les sangles qui retiennent mes jambes et mes bras !<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Pour ce qui est de la r\u00e9ponse \u00e0 mes besoins, j\u2019aurais par exemple voulu avoir acc\u00e8s \u00e0 mon ordinateur de fa\u00e7on autonome afin de pouvoir travailler par moi m\u00eame, ce qui n\u2019\u00e9tait absolument pas le cas \u00e0 l\u2019\u00e9poque, et qui a bien chang\u00e9 aujourd\u2019hui !<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Ma seule fa\u00e7on d\u2019exploiter l\u2019ind\u00e9pendance qui \u00e9tait donn\u00e9e, et dans mon cas quelque peu impos\u00e9e, \u00e9tait de faire les cent pas, si j\u2019ose dire, dans mon foyer avec mon fauteuil \u00e9lectrique command\u00e9 \u00e0 l\u2019aide de mon menton ! Une ou deux fois, je me suis autoris\u00e9 sur un coup de t\u00eate (j’\u00e9tais vraiment inconscient !) \u00e0 sortir seul, \u00e0 traverser la rue pour faire un petit tour dans le parc d’\u00e0 c\u00f4t\u00e9. Si j’avais eu un probl\u00e8me de fauteuil ou quoi que ce soit d\u2019autre, j’aurais \u00e9t\u00e9 bien emb\u00eat\u00e9 (personne ne m’aurait compris, d\u2019autant que le foyer ne surveillait pas nos entr\u00e9es et sorties). Cependant, je garde un sentiment d’audace absolu et je suis quand m\u00eame un peu nostalgique de cette \u00e9poque !<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Entendons nous bien, j’ai b\u00e9n\u00e9fici\u00e9 d\u2019am\u00e9nagements en raison de mon handicap, ce qui m\u2019a permis de suivre les cours et de trouver une r\u00e9ponse \u00e0 mes besoins \u00e9l\u00e9mentaire. J\u2019en suis bien conscient et reconnaissant. Ma critique se porte sur cette notion de confiance et d\u2019am\u00e9nagement individuel que j\u2019ai pein\u00e9 \u00e0 retrouver, jusqu\u2019\u00e0 ce que je fasse appel \u00e0 deux \u00e9tudiants pour m\u2019accompagner dans mon travail. Sur le plan param\u00e9dical, j\u2019ai rencontr\u00e9 des difficult\u00e9s similaires. L\u2019accompagnement propos\u00e9 par le foyer ne r\u00e9pondait pas \u00e0 mes besoin et j\u2019ai d\u00fb me r\u00e9soudre \u00e0 faire appel \u00e0 un kin\u00e9 en lib\u00e9ral pour ma prise en soin.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Au bout de trois ans de compromis et de difficult\u00e9s, mais aussi de belles surprises parfois, le foyer m\u2019a annonc\u00e9 qu\u2019il serait probablement mieux pour moi d\u2019aller dans une MAS (Maison d\u2019Accueil Sp\u00e9cialis\u00e9e), qui r\u00e9pondrait davantage \u00e0 mes besoins et mes attentes. Voulant retourner plus pr\u00e8s de ma famille en r\u00e9gion parisienne, je d\u00e9cidais de suivre leur conseil et de quitter mon foyer, croyant na\u00efvement en cet eldorado d\u2019accueil !<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Si mon exp\u00e9rience en foyer pour \u00e9tudiants en situation de handicap a \u00e9t\u00e9 plut\u00f4t n\u00e9gative, ce n\u2019est pas le cas du diagnostic que je peux en faire aujourd\u2019hui. Je crois que le caract\u00e8re hors norme de mon handicap a g\u00e9n\u00e9r\u00e9 un fort sentiment d\u2019impuissance chez les personnes engag\u00e9es dans cette initiative. La directrice du foyer, qui me voyait tourner inlassablement dans les couloirs, ne me demandait m\u00eame pas ce que j’aimerais qu’elle fasse pour rem\u00e9dier \u00e0 ce probl\u00e8me, elle pr\u00e9f\u00e9rait passer \u00e0 c\u00f4t\u00e9 de moi en m’ignorant ! Pourtant, par bien des aspects, cette structure,\u00a0 en lien avec l’universit\u00e9,\u00a0 \u00e9tait extr\u00eamement novatrice ! La possibilit\u00e9 d\u2019am\u00e9nager la temporalit\u00e9 de mes \u00e9tudes, tant pour la validation des UE en plusieurs ann\u00e9es que pour les rendus de devoirs pour lesquels je pouvais b\u00e9n\u00e9ficier de temps suppl\u00e9mentaire, et que je pouvais faire \u00e0 domicile ; l’atmosph\u00e8re moins aseptis\u00e9e que dans d’autres foyers pour personnes handicap\u00e9es; un sentiment de bienveillance et d\u2019authenticit\u00e9; la possibilit\u00e9 de contr\u00f4ler mon emploi du temps, mes menus et mes activit\u00e9s; autant de facteur pr\u00e9cieux d\u2019humanisation des personnes en situation de handicap accueillies !<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Comme je vous l\u2019ai dit, j\u2019ai pos\u00e9 le choix, au bout de trois ans pass\u00e9s dans le foyer de Nancy, d\u2019int\u00e9grer une MAS \u00e0 Neuilly et de continuer mes \u00e9tudes de sociologie \u00e0 l\u2019universit\u00e9 de Nanterre. Loin de constituer une r\u00e9ponse \u00e0 mes attentes, mon s\u00e9jour dans cet \u00e9tablissement est venu renforcer mon exp\u00e9rience n\u00e9gative de ce type de structures d\u2019accueil sp\u00e9cialis\u00e9. J\u2019\u00e9tais le seul \u00e0 avoir un rythme d\u2019\u00e9tudiant et l\u2019\u00e9tablissement n\u2019\u00e9tait absolument pas adapt\u00e9 \u00e0 ce mode de fonctionnement. Je ne comprends toujours pas aujourd\u2019hui comment j\u2019ai pu \u00eatre admis alors que mes besoins \u00e9taient si diff\u00e9rents de leur capacit\u00e9s d\u2019accueil.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Du fait de ce d\u00e9calage, j\u2019ai v\u00e9cu tr\u00e8s difficilement cette p\u00e9riode, ce qui a forc\u00e9ment impact\u00e9 la qualit\u00e9 de mon travail universitaire ! Je peux aujourd\u2019hui t\u00e9moigner de la relation \u00e9troite entre qualit\u00e9 de l\u2019environnement et r\u00e9ussite scolaire. J\u2019ai donc tr\u00e8s rapidement quitt\u00e9 la MAS de Neuilly pour rejoindre la r\u00e9sidence universitaire de Nanterre.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Dans un premier temps, j\u2019ai cru avoir trouv\u00e9 un \u00e9quilibre ! J\u2019\u00e9tais accompagn\u00e9 24 heures sur 24, dans ma vie universitaire comme dans ma vie de tous les jours, ce qui \u00e9tait tr\u00e8s satisfaisant. Les complications n\u2019ont pas tard\u00e9 \u00e0 pointer leur nez. La dynamique de la r\u00e9sidence a chang\u00e9, passant d\u2019un accompagnement personnalis\u00e9 \u00e0 une prise en charge plus classique, uniformis\u00e9e, mutualis\u00e9e. J\u2019\u00e9tais donc \u00e0 nouveau pris dans les \u00e9cueils du syst\u00e8me universitaire, priv\u00e9 de mon accompagnement 24 heures sur 24 et devenant un \u00e9tudiant parmi tant d\u2019autres !<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
J\u2019ai tout de m\u00eame fini par valider ma licence puis mon master de sociologie et par retrouver un \u00e9quilibre qui me permettait d\u2019avancer. C\u2019est dans ces conditions que m\u2019est venue la volont\u00e9 d\u2019\u00e9crire un livre retra\u00e7ant mon parcours et mon v\u00e9cu des institutions.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
N\u2019ayant manifestement pas retenu la le\u00e7on, j\u2019ai d\u00e9cid\u00e9 de prolonger mes \u00e9tudes en attaquant un deuxi\u00e8me master portant sur les pratiques inclusives du handicap \u00e0 l’INS HEA.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Aujourd\u2019hui, apr\u00e8s plusieurs ann\u00e9es durant lesquelles les responsables de cet \u00e9tablissement n\u2019ont pas voulu maintenir un lien professionnel avec moi, j\u2019ai r\u00e9ussi \u00e0 les convaincre de la n\u00e9cessit\u00e9 de la pr\u00e9sence de personnes en situation de handicap dans leur \u00e9quipe p\u00e9dagogique. C\u2019est une grande joie pour moi de pouvoir participer \u00e0 la formation des \u00e9tudiants qui seront charg\u00e9s de construire l\u2019avenir des institutions du handicap.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Vous aurez compris maintenant que mon parcours scolaire et universitaire n\u2019a pas \u00e9t\u00e9 de tout repos ! J\u2019ai fait des rencontres formidables, t\u00e9moignant d\u2019une volont\u00e9 de me comprendre et de m\u2019accompagner, mais j\u2019ai aussi crois\u00e9 la route de personnes repouss\u00e9es ou d\u00e9boussol\u00e9es par mon handicap et mes besoins tr\u00e8s sp\u00e9cifiques.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Je garde de ces ann\u00e9es une grande fiert\u00e9, une certitude de pouvoir ouvrir toutes les portes et relever tous les d\u00e9fis ! Je n\u2019oublie pourtant aucune des indiff\u00e9rences, aucun des rejets, et me rappelle de chaque compromis, mais je fais le choix de l\u2019optimisme. Je crois que mon exp\u00e9rience met en lumi\u00e8re la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019un changement dans la construction et l\u2019accompagnement du parcours scolaire et universitaire des personnes en situation de handicap.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
En effet, m\u00eame si, je le reconnais, mon cas est hors normes et particuli\u00e8rement d\u00e9licat \u00e0 accompagner et \u00e0 g\u00e9rer, je n\u2019ai jamais r\u00e9ellement trouv\u00e9 de r\u00e9ponse satisfaisant mes besoins. Au lyc\u00e9e Toulouse-Lautrec, j\u2019ai pu obtenir ce dont j\u2019avais besoin, mais seulement au prix d\u2019un bras de fer constant. A Nancy, j\u2019ai ressenti un manque de flexibilit\u00e9 et de compr\u00e9hension face \u00e0 mes besoins et mes aspirations. Dans la suite de mes \u00e9tude j\u2019ai fortement ressenti le manque de liens social avec les autres \u00e9tudiants de mon cursus.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Je suis bien conscient du d\u00e9fi que repr\u00e9sente l\u2019\u00e9coute des besoins individuels pour les institutions, mais c\u2019est dans cette \u00e9coute que na\u00eet le respect. La norme est de mettre en place une distance professionnelle avec les personnes en situation de handicap. Cette distance veut prot\u00e9ger \u00e0 la fois les accompagnants et les accompagn\u00e9s, mais elle est pour moi profond\u00e9ment incompatible avec un accompagnement adapt\u00e9. Comment esp\u00e9rer mettre en place une d\u00e9marche satisfaisante sans s\u2019impliquer \u00e9motionnellement, sans donner de soi. Ce refus du lien est un facteur de d\u00e9shumanisation.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
La r\u00e9alit\u00e9 dont je vous ai fait part est d\u00e9j\u00e0 en train de se transformer ! Les personnes en situation de handicap ont de plus en plus acc\u00e8s aux \u00e9tudes sup\u00e9rieures. Cependant, l\u2019entr\u00e9e dans la vie universitaire est encore un combat, il nous faut nous justifier de notre pr\u00e9sence, l\u00e0 o\u00f9 cette question ne se pose m\u00eame pas pour les personnes dites valides. Certes, nous avons besoin que le cursus universitaire s\u2019adapte \u00e0 nos particularit\u00e9s, mais la question \u00e0 se poser devrait \u00eatre \u201ccomment le faire\u201d et non \u201ccela vaut-il la peine de le faire\u201d !<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Reformuler la question de nos \u00e9tudes sup\u00e9rieures de cette fa\u00e7on permettrait de limiter la rupture brutale de suivi et d\u2019accompagnement \u00e0 la fin des \u00e9tudes secondaires. L\u2019objectif d\u2019une telle d\u00e9marche est aussi, selon moi, de limiter un ph\u00e9nom\u00e8ne que je nomme \u201chandification\u201d. Il s\u2019agit de ne consid\u00e9rer les personnes en situation de handicap qu\u2019au travers de leurs limitations, d\u00e9rive particuli\u00e8rement pr\u00e9sente au sein des \u00e9tablissements d\u2019accueil ou \u201cfoyers\u201d.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n
Je couple souvent ce terme d\u2019\u201dhandification\u201d avec celui de \u201cvalidification\u201d, qui d\u00e9signe la dynamique inverse. J\u2019entends dans cette \u201cvalidification\u201d le fait de mettre de c\u00f4t\u00e9 nos limitations pour se concentrer sur nos capacit\u00e9s. Cela peut avoir un double effet. Si nos limitations sont simplement occult\u00e9es, elles deviennent un obstacle \u00e0 notre r\u00e9ussite. Mais si la distance professionnelle c\u00e8de la place au respect, si notre accompagnement nous permet de composer avec nos difficult\u00e9s et de d\u00e9velopper notre pouvoir d\u2019agir, alors notre potentiel peut s\u2019exprimer pleinement et nous nous sentons devenir, dans le regard de ceux qui nous entourent, des semblables !<\/p>\r\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"
J\u2019ai un handicap de naissance, je suis infirme moteur c\u00e9r\u00e9bral, et n\u2019ai pas l\u2019usage de la parole ni le contr\u00f4le de mes mouvements. Je suis honor\u00e9 de vous partager mon exp\u00e9rience scolaire et universitaire, mais aussi plus largement mon analyse de cet aspect de la vie des personnes en situation de handicap.\u00a0 Je crois profond\u00e9ment …<\/p>\n