international – Rage d'exister https://ragedexister.com Vivre pleinement au-delà du handicap Wed, 24 Aug 2022 17:03:31 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=5.5.15 La qualité compte dans la prise en soins dentaires par Philippe Aubert IADH 2022 International Association for Disability and Oral Health https://ragedexister.com/la-qualite-compte-dans-la-prise-en-soins-dentaires-par-philippe-aubert-iadh-2022-international-association-for-disability-and-oral-health/ Wed, 24 Aug 2022 16:41:57 +0000 https://ragedexister.com/?p=747 La qualité compte dans la prise en soins dentaires par Philippe Aubert IADH 2022 International Association for Disability and Oral Health Lire la suite »

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Issy-les-Moulineaux, Paris, le 24 août 2022

 

Mesdames, Messieurs bonjour,

Je tiens à remercier tout d’abord les organisateurs de ce colloque IADH pour leur invitation à m’exprimer devant vous aujourd’hui.

Merci  d’organiser l’événement en présentiel, dans un contexte si difficile ces deux dernières années. Le fait d’être ici, ensemble, est déjà un défi réussi.

Je tiens également à exprimer ma gratitude au réseau français SOSS France, qui m’avait invité à m’exprimer en 2020.

C’est aujourd’hui la première fois que j’utilise ma synthèse vocale pour m’exprimer en Anglais.  Je suis ravi de le faire avec vous.

Merci enfin à chacune et chacun d’entre vous d’être venu assister à ce congrès et ainsi vous rassembler pour discuter des pratiques inclusives du handicap dans le soin dentaire spécifique.

Quelques mots à mon propos. J’ai 42 ans, et je vis avec une paralysie cérébrale depuis ma naissance.

Je suis athétosique de surcroît, ce qui fait que je n’ai pas le contrôle de mes mouvements. Je n’ai pas non plus la fonction de la parole,  ce qui m’oblige à vous parler via une synthèse vocale que je commande par voie oculaire !

J’ai conscience que cela peut être compliqué de me comprendre. L’équipe qui m’entoure et moi-même avons fait en sorte de donner un rythme et des pauses suffisantes pour vous permettre de tenir la durée de mon propos.

J’aimerais démarrer maintenant le fond de mon propos sur l’importance de la qualité de la relation. Et pour moi, la qualité et ce qui compte le plus se traduit par l’écoute. 

L’écoute des besoins du patient. Savoir donc entendre, comprendre, saisir ce que chaque patient veut dire.

Chaque patient est différent. Vous le savez bien.

L’écoute passe par une relation dans le temps. Prendre le temps, en tant que professionnel pour expliquer à l’avance, sur plusieurs jours, mois et années si besoin, en quoi consiste la séance du jour.  Adapter les mots à la compréhension de chaque patient.

Dédramatiser le séjour à l’hôpital peut se faire en proposant qu’une personne qui accompagne et connaît bien le patient reste à ses côtés durant la séance ou l’hospitalisation, si les conditions d’accueil le permettent.

L’écoute, ou prendre soin, passe également par le fait de faire en sorte que le cabinet soit un univers rassurant,  tout comme les gestes et attitudes de l’équipe qui prend en charge la personne qui a besoin des soins dentaires.

A plus forte raison si le patient doit faire les soins en milieu hospitalier,  et notamment sous anesthésie générale, ce qui est mon cas.

L’écoute, c’est envisager qu’il ne s’agit pas uniquement soigner à proprement parler, mais penser à l’esthétique, au rôle social des dents, et à la manière dont la chirurgie va impacter la vie de la personne qui reçoit les soins.

Concernant l’écoute comme sens corporel, il me semble essentiel de faire le lien avec la façon dont je m’exprime.

Dès mon enfance, avant la maîtrise de l’alphabet et du français, j’ai communiqué, en  utilisant toujours beaucoup mon visage et ses expressions.

Encore maintenant, cela reste un moyen capital pour exprimer mes émotions, qui ne peuvent pas toujours transparaître à travers ma voix numérique !

J’ai pris notamment très tôt conscience du rôle des yeux, du regard.

C’est grâce à mes yeux que mes proches ont très tôt saisi ma soif de communiquer, et de me faire entendre.

Mais je n’avais pas saisi l’importance de ma bouche, puisque je n’ai jamais pu prononcer un mot, ni même émettre des sons compréhensibles.

Donc, ma bouche et mes dents m’étaient nécessaires pour manger, mais pas pour communiquer.

Mes dents ont d’ailleurs plutôt longtemps été une source de désagréments, compte tenu des difficultés que je devais vivre pour les soigner.  Je vais vous en parler plus tard.

Ce n’est donc qu’assez récemment que j’ai pris conscience que ma bouche et mes dents jouaient un rôle important dans mon expression et mon esthétique.

Il a fallu que j’en vienne à des extrémités pour devoir me faire refaire presque totalement la mâchoire, afin que je puisse revendiquer, et apprécier enfin ma bouche et mes dents.

Et c’est grâce aux regards des autres sur moi, que j’ai pu découvrir mon visage, sa représentation et mon droit à croquer la vie à pleines dents.

Donc, mon propos aujourd’hui peut être mordant !

Mais rassurez vous, je ne mords pas !

Je veux simplement témoigner que pouvoir se soigner les dents, c’est plus qu’un acte médical pour soi, c’est un acte de dignité, un acte de reconnaissance, pour soi et les autres.

Cela participe à la construction de soi, mais aussi à notre existence avec les autres.

Mais le parcours dentaire peut être difficile, notamment pour des personnes comme moi, en situation de handicap.

Concernant les liens entre esthétique, écoute des patients, prise en soin, respect, il me vient une anecdote.  Si on ne m’avait pas soigné à temps, j’aurais été contraint de manger de la nourriture uniquement mixée.  Le soin dentaire spécifique favorise donc, en plus, la socialisation des personnes soignées.  Dans le sens où de fait, il me serait plus compliqué de me rendre dans des restaurants, et demander que tout le repas soit mixé,  ou aller chez des amis et ne pas goûter les mêmes plats que les autres, partager un gâteau d’anniversaire par exemple.

Quand je réfléchis à cette relation de soin, je fais des liens entre celui qui les reçoit et celui qui les donne.  C’est pourquoi, selon moi, l’aspect nécessaire de l’écoute de chaque professionnel est une évidence également.

Ce sont des métiers de soin, faits par des personnes qui peuvent aller jusqu’à prendre davantage soin des autres que d’eux-mêmes.  Qui donnent de leur temps, de leur énergie, de leurs compétences au service, et parfois s’oublient en chemin.

Si je suis aujourd’hui connu dans mon entourage pour être un homme au sourire éclatant et aux yeux rieurs, je suis très conscient que c’est une chance pour moi, et je sais à qui je le dois :

Au réseau français SOSS France, membre de l’IADH.

C’est encore aujourd’hui pour moi l’occasion de remercier les chirurgiens-dentistes qui ont procédé aux opérations de soin dentaire, qui en partie m’ont sauvé la vie !

J’aimerais illustrer mon propos par une série d’anecdotes sur mon parcours de soins,  et ensuite aborder avec vous les enseignements que j’ai pu en tirer.

Lorsque je vivais tout jeune dans un Institut d’Education Motrice, et que le dentiste venait, je filais exprès loin pour que les infirmières oublient que j’avais un rendez-vous dentaire.

Après, durant plusieurs années, j’ai dû subir plusieurs anesthésies générales, en moyenne une par an, afin de soigner toujours le même problème de caries.

Un jour, à 12 ans, mon oncle qui est chirurgien dentiste a voulu examiner mes dents dans son cabinet.

J’ai failli d’abord avaler la petite plaque radio qu’il m’avait mise en bouche.

Ensuite, j’ai failli casser le siège et l’ensemble du plateau d’examen ; ils étaient pourtant 4 hommes adultes à me tenir les bras et le corps.

Ma première opération dentaire a eu lieu l’année de mes 8 ans. J’ai vu débarquer un aide-soignant immense, qui m’a conduit au bloc opératoire.

Effrayé par sa taille, je me débattais sur le brancard.

Une autre fois, je me souviens avoir été accueilli, entre guillemets, par une infirmière, également complètement apeurée par moi, et qui m’a collé un masque d’ anesthésie sur le visage.

Après, dans la salle de réveil, reprenant progressivement conscience, je me suis mis à bouger sur le brancard. J’avais peur de tomber au sol parce que les barrières ne recouvraient pas la totalité du brancard.

Cela s’est malheureusement reproduit lors des opérations suivantes également.

Ce qui indique un manque de formation des personnels aux différents types de handicaps, à l’époque.

A l’adolescence, au sein de l’établissement scolaire spécialisé au sein duquel je suis resté douze ans, je faisais contrôler mes dents par le dentiste qui venait dans l’établissement.

Durant les années où j’avais entièrement confiance en mon éducateur référent,  on a même réussi à me soigner les dents dans le cabinet, après m’avoir tranquillement tout expliqué, et après m’avoir donné un petit calmant pour apaiser mes peurs.

Par contre, les fois où cela ne marchait pas, la dentiste me donnait une prescription pour aller à l’Hôpital Saint Vincent de Paul pour me programmer une anesthésie générale.

Une fois, j’ai oublié volontairement de la donner à mon père. Ca n’est qu’une fois l’été terminé , en ouvrant mon sac à dos, qu’il a remis la main dessus !

J’ai vécu plusieurs moments particulièrement traumatisants, notamment des bribes de phrases entendues, enfant et ado, après des opérations, telles que   “il est fou” ou bien  “à quoi bon le laisser vivre ?” de la part de différents niveaux des personnels médicaux, en particulier en soins dentaires !

Avant de trouver Handident en 2017, nous avons fait le tour de tous les hôpitaux de la région de Paris.

Le souci : ils ne proposaient que d’extraire les dents !

La recherche de soins dentaires adaptés pour moi a duré très longtemps.

Heureusement, une amie dentiste, lors d’un voyage en Floride, a fait la rencontre d’une personne qui connaissait un réseau nommé Handident, et a permis de faire la connexion.

J’ai eu la possibilité de prendre la parole lors du dixième anniversaire de ce réseau, pour dire  qu’ils avaient changé ma vie.

A cause d’un bruxisme prononcé, j’étais arrivé à presque complètement araser mes dents, et j’allais progressivement vers de graves difficultés pour mâcher et manger.

L’accueil chaleureux, respectueux valait l’attente, tant la qualité humaine était présente au cœur de la démarche de ce réseau !

Cela a fait toute la différence pour moi !

L’homme adulte que je suis aujourd’hui, est mieux épanoui, ose sourire, et rayonne maintenant grâce à eux.

J’ai plus de 40 ans, et presque toutes les dents neuves !

Maintenant, je sais combien dans mon mode de communication, le sourire fait partie de mon identité et participe à construire l’image que je renvoie lorsque je m’exprime !

Pour l’homme public que je deviens, c’est un véritable atout.

Je vous propose maintenant le point de vue d’une personne en situation de handicap sur les points facilitants et ceux créant des obstacles dans le cadre des soins dentaires. Pour moi, et sûrement pour d’autres personnes en situation de handicap en cabinets dentaires, tout joue un rôle.

La texture des sièges, le transfert de fauteuil, la lumière en pleine tête, les bruits de la fraise et autres outils dentaires, les odeurs typiques d’un cabinet dentaire sont parfois des facteurs déclencheurs de crises soit spastiques, soit de délires, d’angoisses mentales ou autres …

Moi, par exemple, l’odeur de l’eugénol me donne envie de vomir !

A contrario, il est possible de faciliter le vécu des patients.

Il n’existe pas une seule formule magique qui fonctionnerait à tous les coups pour tout le monde.  Mais il existe peut être un mot magique.

Il s’agit pour moi du respect. Je crois qu’il est important de revenir sur cette attitude, sur cette valeur.

Je suis bien conscient du défi que représente l’écoute des besoins individuels pour les institutions, mais c’est dans cette écoute que naît le respect.

Je souhaite substituer cette notion à celle, très commune dans le milieu médical, de distance professionnelle.

Cette distance veut protéger à la fois les accompagnants et les accompagnés, mais elle est pour moi profondément incompatible avec un accueil et une prise en soin adaptés.

Comment espérer mettre en place une démarche satisfaisante sans s’impliquer émotionnellement, sans donner de soi ?

Je participe aujourd’hui à ce congrès IADH, où je suis convaincu que cette notion de respect, de qualité du soin est centrale, tant dans son processus en création et organisation que dans les ambitions et visées finales.

Je vous l’ai dit, j’ai longtemps cherché une prise en soin qui soit satisfaisante pour moi, concernant mes besoins dentaires spécifiques. 

Je n’ai rencontré un réel respect qu’auprès d’Handident.

Vous l’aurez peut être remarqué, mais je parle de prise en soin (“taking care of”), et non de prise en charge (“being in charge”).

C’est volontaire ; d’ailleurs, si j’ai pu avoir souvent l’impression d’être une charge lors de mon accueil dans un cadre médical, j’ai vraiment ressenti qu’on me prenait en soin, et non plus en charge chez Handident !

Ce changement tout simple de vocabulaire illustre un changement bien plus profond dans la façon de m’accueillir, et de se mettre à l’écoute de mes besoins.

En somme, ce vocabulaire est plus respectueux, plus humain.

Si cette expression peut témoigner d’un état d’esprit, elle peut aussi marquer le début d’une prise de conscience.  Les mots ne sont pas innocents !

Aussi, j’aimerais maintenant aborder avec vous un sujet qui me tient à cœur,  et qui est pour moi en lien étroit avec la prise en soin des personnes en situation de handicap, notamment dans le cadre de soins dentaires.

La grande question de l’inclusion des personnes en situation de handicap, est souvent rapportée à la question de l’autonomie, en relation avec  la vulnérabilité.

Sur ce sujet, je suis sensible aux pensées de Paul Ricoeur, concernant la mise en relation des concepts de vulnérabilité et d’autonomie.

D’une part, il nous invite à reconnaître que nous sommes tous vulnérables, et, d’autre part, il propose de considérer  l’autonomie comme une réalité d’interdépendance et de lien avec les autres, une identité relationnelle.

Comme le commente la philosophe Cynthia Fleury, pour Paul Ricoeur,  l’autonomie est la possibilité d’attester de soi, et la vulnérabilité est la difficulté de cette attestation.

La personne en situation de handicap  est donc victime, d’une part, du soupçon de l’impossibilité d’attester de soi,  et d’autre part d’être considéré de ce fait, irresponsable. 

Une double peine, en somme !  une injonction existentielle traumatisante.

Être autonome, c’est alors aussi être identifié par soi et par les autres comme un sujet, décideur de ses propres actes. C’est aussi avoir confiance dans sa propre capacité à être ce sujet.

Pardonnez-moi ce commentaire un peu philosophique, mais je ressens personnellement très fort son sens pour m’expliquer mon attitude et mon combat pour assurer le respect de chaque personne à être mis en situation de responsabilité et de pouvoir agir.

C’est là que je veux faire le lien avec ma présence aujourd’hui devant vous.

C’est ici que prend racine mon utilisation du terme de respect, et de l’expression “prise en soin”.

Paul Ricoeur encore, définit le rôle du soignant comme étant d’encourager, d’accompagner et de soutenir le sentiment d’être capable, la confiance dans cette identité de sujet acteur et décideur.

Le soignant, et plus largement la structure d’accueil, doit susciter chez la personne vulnérable, et autonome en devenir, un sentiment de capacité, ou en tout cas laisser la porte ouverte à la possibilité de ce sentiment.

Je rejoins profondément cette réflexion.

Il est essentiel, selon moi, de sortir de cette conception de l’autonomie par opposition à la vulnérabilité.

Nous sommes tous, en permanence, autonomes et vulnérables à la fois.

La personne autonome est alors, celle qui est en capacité de construire son récit de vie en composant, AVEC sa vulnérabilité.

Cette dernière n’est alors plus stigmatisante, mais une simple composante de son identité.

Je mesure pleinement au regard de mon parcours dentaire, les difficultés que vous pouvez rencontrer pour avancer dans cette voie avec des personnes en situation de handicap.

Mais vous intervenez sur ce qui est, selon Emmanuel Lévinas, le lien primordial de la reconnaissance de l’autre, le visage.

D’un point de vue pratique et professionnel, l’expérience que j’ai vécue avec Handident, me fait espérer que ce soit faisable pour d’autres personnes, mais cela suppose que toutes les institutions qui entourent le praticien dentaire, se plient à cette nouvelle approche, qui a un coût humain et financier.  et qui donc fondent un projet collectif pour la société.

Pour conclure, j’ai bien conscience que mon propos est coloré par ma nationalité française. Nous avons notre façon de faire les choses, notre relation au handicap spécifique, notre modèle de système de santé. Cela implique des réalités différentes de par le monde, pour la gestion de la crise COVID de que nous connaissons, mais aussi pour les prises en soin ordinaires. Par exemple, selon les systèmes de santé, le reste à charge pour le patient n’est pas nécessairement le même, ce qui peut jouer sur la prestation et les attentes de ce dernier.

Et ces attentes sont en mutation. Je parle souvent dans mes propos d’une génération que j’appelle “vestiaire”, en référence à une série française sur le handicap. Cette génération veut participer pleinement, et je crois qu’elle se retrouve aussi dans la question du soin. Les patients en situation de handicap ont des attentes différentes, voulant une prise en soin et un accompagnement qui écoute leurs besoins spécifiques et les mettent en confiance.

Mais cette génération de patients grandit en parallèle d’une génération de professionnels, formés autrement et qui sont en quête de sens et d’impact social dans leur parcours et leur pratique professionnelle.

Je crois que cette réalité peut être la source d’une valorisation à la fois des patients dans l’écoute de leurs attentes, mais aussi des professionnels dans la façon dont ils apportent des réponses toujours plus adéquates aux défis que leur présentent leurs patients.

Je suis convaincu que tout cela passe par ce que je vous ai présenté, une relation de confiance et d’humanité, dans un respect qui élève tout à la fois le dentiste dans son rôle de soignant et la personne comme sujet de droits. Une relation dans laquelle la personne qui reçoit les soins est rendue active en tant que patient dans la préparation et le vécu de son parcours de soin.

Je ne voudrais pas conclure sans préciser que, pour moi, votre préoccupation rejoint une action plus globale qui donne peut-être une orientation plus significative, à la notion de société inclusive.

Je m’appuierai pour cela sur la définition de la politique du Care, donnée par une de ses initiatrices Joan Tronto :

“Activité caractéristique de l’espèce humaine, qui recouvre tout ce que nous faisons dans le but de maintenir, de perpétuer et de RÉPARER notre monde, afin que nous puissions y vivre aussi bien que possible.

Ce monde comprend nos corps, nos personnes et notre environnement, tout ce que nous cherchons à relier en un réseau complexe en soutien à la vie”.

Je vous invite aussi à vous poser les deux questions suivantes.

Quels partenariats mettre en place avec les patients de plus en plus formés, experts de leurs pathologies ?

Comment l’éducation thérapeutique du patient peut-elle s’envisager dans le milieu du soin dentaire ?

Pour répondre à ces questions et à bien d’autres, je voudrais oser vous proposer une initiative de recherche collective.

Tout au long de mon exposé, je vous ai fait part de mon expérience de patient, de mes attentes, et j’ai esquissé les grands principes sur lesquels je conçois le rapport entre soignants et soignés.

Mais je voudrais aller plus loin.

D’abord, je ne m’exprime qu’en mon nom propre. De surcroît, je ne représente qu’une infime partie des personnes à besoins spécifiques, et en plus je crois que l’expérience de ces personnes peut servir à toutes et à tous.

Ensuite, et c’est à mes yeux le plus important, je suis convaincu que beaucoup d’entre vous ont des expériences et des pratiques très intéressantes à proposer.

Aussi, je voudrais vous suggérer  de mettre en place un protocole de recherche qui dans un premier temps recueille des pratiques, à travers une grille très ouverte, mais rigoureuse, établie avec votre association et des patients-experts.

Dans un deuxième temps, ce travail pourrait servir de base pour un guide méthodologique et déontologique international que votre association pourrait adopter à un prochain congrès, pour la présenter comme contribution à l’Organisation des Nations Unies.

Je vous prie de me pardonner cette audace.

Ma seule justification est de m’engager à y travailler activement.

J’ai personnellement engagé une réflexion à partir d’une approche phénoménologique, adaptée notamment par Francisco Varela et ses travaux en Neurophénoménologie et sur le Bouddhisme.

Ceci pour éclairer le pouvoir d’agir et les conditions d’autonomie et d’autodétermination des individus, et l’importance des interactions qu’ils nouent dans des situations particulières.

Je pense que la situation de soins dentaires présente des caractéristiques qui permettent d’en faire un terrain très propice à éclairer le rôle des patients dans une relation de soins, mais aussi, en interactions l’inventivité des équipes de soignants, inscrites dans une chaîne de coopérations multiples.

Je vous remercie sincèrement pour votre écoute.  Très bon congrès à tous.

Philippe Aubert

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International Association for Disability and Oral Health Quality matters defining quality of care by Philippe Aubert https://ragedexister.com/international-association-for-disability-and-oral-health-quality-matters-defining-quality-of-care-by-philippe-aubert/ Wed, 24 Aug 2022 13:26:51 +0000 https://ragedexister.com/?p=744 International Association for Disability and Oral Health Quality matters defining quality of care by Philippe Aubert Lire la suite »

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Issy-les-Moulineaux, Paris, August 24th, 2022

Good morning, ladies and gentlemen,

First of all, I would like to thank the organizers of this IADH conference for their kind invitation to give a lecture today as a key speaker.

Thank you for organizing this event, in such a difficult context. To have gathered all participants in person here today after the past two years is already a successful challenge.

I would also like to express my gratitude to the French team, SOSS France, which invited me to speak in 2020 about my experience on special dental care.

Today is the first time I’m using my voice synthesizer device to speak in English.  I am delighted to do so with you.

Finally, I would like to thank each and every one of you for attending this congress to discuss inclusive practices in special dentistry care.  It does mean a lot for me and for your patients worldwide.

You have my short biography in the program. But, please let me give you just a few words about myself.  I was born with cerebral palsy 42 years ago.

I also have athetosis, which means I have no control over my movements.

I also have no speech function, which forces me to speak to you, via a voice synthesizer with eye control !  

I am fully aware that understanding me through this system can be complicated. My assistants and I, have made sure to give my speech enough rhythm, and sufficient pauses to allow you to bear with me until the end.

I would like to start my speech now with the importance of the quality of the relationship between patient and dentist. And for me, what matters most is listening. 

Listening to the needs of the patient.  Hearing, listening, understanding what each patient means to say in its own way.  

Every patient is different. You already know that all too well.  

Listening requires a relationship over time.  I invite you to take the time, as a professional, to explain in advance, over several days, months or years if necessary,  what a particular treatment will consist in. You may try and adapt your words to the understanding of each patient.   

To make the hospital less stressful, you may suggest that someone who knows well the patient should stay at her or his side,  whether during or after the time spent in your department, if practical conditions allow for it.

Listening, meaning in that case taking care of, also means making sure that both the department itself and the people working there are welcoming,  as well as the gestures and attitudes of the team that takes care of the person who needs specific dental care. 

This is even more important if the patient has to undergo treatment in a hospital, especially under general anesthesia, if I shall speak about my personal situation.

Listening also means considering not only the treatment, but the social role of good dental aesthetics, and the way in which the treatment will affect the life of the person receiving it.

Listening in its prime sense is the body function. It seems essential to me to make the link with the way I express myself.

Before I mastered the alphabet and the French language, I used to communicate mainly using facial expressions.

Even now, this remains a crucial means of how I express my emotions, something which cannot always be conveyed through my digital voice !

I became aware very early of the role of my eyes, of my gaze.

Thanks to the way I used my eyes, my friends and family understood very early my desire and capacity to communicate and to be heard.

But, since I never pronounced a word, nor even emitted understandable sounds I couldn’t understand the importance of my mouth and dentition.

To me, my mouth and my teeth were necessary to eat, but not to communicate.

Actually, for very long, my teeth were quite a source of problems, considering how difficult it was for me to receive any treatment, but I will tell you more about this later.

Therefore, it is only quite recently that I became aware that my mouth and my teeth played an important role in my expressions and aesthetics.

I had to go to the extreme of having all my teeth replaced so that I could claim, and finally appreciate, my mouth and dentition.

And thanks to the gaze of every person I met since, I was able to discover my face,  its representation and my right to bite into life or crunch life to the fullest.

That’s why my words today might cut and bite !

I simply want to testify that getting dental treatment is more than a medical act for oneself, it is an act of dignity, an act of recognition, for oneself and for others.

It contributes to the construction of your own self, but also affects your relationships with others.

But, a dental journey can be difficult, especially for people like me, with a heavy disability.

I want to create links between aesthetics, listening to the patients, taking care of them and showing respect. That’s why, I have an anecdote.

Had I not been treated in time, I would have been forced to eat only blended food.  So, dental care also favors the socialization of the people with special needs. In the way that it would be more complicated for me and many other people in my position  to go to restaurants and ask for the whole meal to be blended,  or to be invited by a friend and not taste the same dishes as the others, or share a birthday cake for example.

Thinking about the relationship between patients and professionals, I want to focus on the connections between the person who receives care and the person who provides care.

That’s why, in my opinion, the way of  very carefully listening and taking care of, in each dentistry profession is really obvious.

These are caring jobs, performed by people who can go so far as taking more care of others than of themselves.  You dedicate your time, your energy, your skills to your practice, and sometimes you forget yourselves along the way.  We, as patients, whatever needs we require, must pay attention to it too.

If I am now known in my public life as a man with a bright smile and laughing eyes, I am very aware that this is a blessing for me,  and I know that I owe it to the French network SOSS France, member of IADH.

Today is another opportunity for me to thank the dental surgeons who carried out my dental care treatment, which in part saved my life !

I would like to illustrate my remarks with a series of anecdotes about my experience as a dental patient and then discuss with you the lessons I drew from that experience.

When I was very young, I used to live in an institute for physically disabled children. When the dentist would come, I would purposely run away hoping the nurses would forget that I had a dental appointment that day.

Afterwards, for several years, I had to undergo several surgical operations carried out under general anaesthesia, almost one operation every year, in order to treat a recurring problem of dental decays.

One day, when I was 12, my uncle, who is a dental surgeon, wanted to examine my teeth in his clinic.  I almost swallowed the little x-ray plate that he had put in my mouth.

Then, I almost broke the seat and the whole examination tray, even with 4 grown adult men holding my arms and body.

I had my first dental surgery when I turned 8. I saw a huge nurse come in and take me to the operating room.  Scared by his size, I struggled on the stretcher.

Another day, I remember being greeted by a nurse. Completely frightened by me, she immediately stuck an anesthesia mask on my face.

Afterwards, in the recovery room, gradually regaining consciousness, I started to move on the gurney.  I was afraid to fall to the ground because the bars did not cover the entire gurney.

Unfortunately, this happened again during many next operations.

This indicates a lack of training of the staff to the different types of disabilities, at that time.   Especially with invisible symptoms.

As a teenager, in the special school in which I stayed and studied for twelve years, I had my teeth checked by the dentist who came to the school. 

During the years when I had complete confidence in my educational social worker, the dentist even managed to treat my teeth in the surgery,  because he had calmly explained everything to me, and given me a little sedative to calm my fears.

On the other hand, when my special preparation didn’t work, or when I did not trust the people, the dentist had to give me a prescription to go to a specific hospital in Paris to plan an operation under general anesthesia,  because Saint Vincent de Paul hospital was the only place where they would take care of kids with anesthesia.

Once, I purposely forgot to give the prescription to my father. It was only after the summer was over, when he opened my backpack, that he found it.

At that time, as a child and teenager, I have experienced several particularly traumatic moments after some operations, including hearing some snippets of conversation,  such as “he’s crazy”  or “what’s the point of letting him live ?” from various levels of medical staff, especially in dental care !

Before finding Handident  special dental care French network in 2017, we went around all the hospitals in Paris region.

The main concern : all Paris hospitals only offered to extract teeth !

The search for the right dental care for me took a very long time.

Fortunately, a dentist friend of mine, while on holidays in Florida, met someone who knew of a network called Handident , and made the connection.

I had the opportunity to speak at the tenth anniversary of this network, saying that they had changed my life.

Due to severe bruxism, I had almost completely ground down my teeth, and I had more and more difficulties chewing and eating.

The warm and respectful welcome was worth the wait, considering that the human quality was present at the heart of the approach of this network !

This made all the difference to me !

The adult man I am today is better fulfilled, dares to smile, and now shines thanks to them.

I am over 40 now, and almost all my teeth are new ! I’m still smiling.

Now, I know how much in my communication mode my smile is part of my identity and helps build the image I send to people when I express myself !

For the public man that I am becoming, it is a real asset.

I would now like to offer you the point of view of a person with a disability concerning the points that smooth and ease,  or the points that create obstacles in the context of dental care.

For me, and I’m sure for other people with disabilities in dental surgeries, everything plays a role.

The texture of the chairs, transferring the patient on the dental chair or not,  the way it is done, the bright light in my eyes, the sounds of the drill and other dental tools, the typical odors of a dental surgery that sometimes trigger spastic attacks, delirium, mental anguish or else …

For example, the smell of eugenol makes me want to throw up !

But for many people, it can facilitate the patients’ experience.

There is no single magic formula that will work for everyone.  But there may be a magic word.

And for me, this key word is respect.

I believe it is important to focus now on this attitude, this value.

I am well aware of the challenge that listening to individual needs represents for institutions where you all work,  but it is in this listening space and time that respect can, and shall be born.

I would like respect to replace the cold notion of professional distance, which is very common in the medical field.

This distance is intended to protect both the people who take care of, and those who are being taken care of, but it is for me, deeply incompatible with adapted special care.

How can we hope to put in place a satisfactory approach without getting emotionally involved, without giving of ourselves ?

I am participating today in this IADH congress, where I am convinced that this notion of respect,  of quality of care is central,  as much in its process of creation and organization, as in its ambitions and final aims.

I told you, I had been looking for a long time for a caring attitude that would be satisfactory for me, concerning my specific dental needs.

I have only found real respect with Handident.

You may have noticed, but I am talking about dental care and not about dental management.  I don’t really know how to translate my point in English, but this refers to the way disability is considered in France. I won’t generalize all the countries, because I don’t know of all the situations.  People with disabilities are still too often considered as a burden, a problem to be managed,  and I refuse to let my way of presenting things emphasize this aspect.

So this is deliberate. Moreover, if I have often felt like a burden when I was welcomed in a medical setting, I really felt that I was being cared for at Handident !

This simple change in vocabulary illustrates a much deeper change in the way you welcome me and listen to my needs.

In short, this vocabulary is more respectful, more human.

If the way I express it can testify of a state of mind, it can also mark the beginning of awareness. Words are not innocent !

So, I would now like to talk to you about a subject that is close to my heart, and which is for me closely related to the care of people with disabilities, especially in the context of dental care.

The great question of the inclusion of people with disabilities is often related to the question of autonomy, in relation to vulnerability.

On this subject, I am sensitive to the thoughts of Paul Ricoeur, concerning the relationship between the concepts of vulnerability and autonomy.

On one hand, he invites us to recognize that we are all vulnerable, and on the other hand, he proposes to consider autonomy as a reality of interdependence and connection with others,  a relational identity.

As the philosopher Cynthia Fleury comments,  for Paul Ricoeur, autonomy is the possibility of attesting to oneself,  and vulnerability is the difficulty of this attestation.

The disabled person is therefore a victim, on one hand, of the suspicion of the impossibility of attesting to oneself,  and on the other hand, of being considered irresponsible.

It is a double punishment, in short !  A traumatic existential injunction.

Thus, to be autonomous is also to be identified by oneself and by others as a subject,  decision maker of one’s own acts.  It is also to have confidence in one’s own capacity to be this subject.

Forgive me for this somewhat philosophical comment,  but these concepts strongly explain my attitude and my fight to ensure that each person be shown respect to be put in a situation of responsibility and of empowerment to act.

This is where I want to make the link with my presence here today in front of you.

It is here that my use of the term “respect” and the expression “care” is rooted.

Paul Riqueur again, defines the role of the caregiver as being to encourage, accompany and reinforce the feeling of empowerment, the confidence, in this identity of the patient being able to act and take decision for herself, or himself.

The caregiver, and more broadly the care facility, must foster a sense of capacity in the vulnerable and autonomous person in the making,  or at least leave the door open to the possibility of this feeling.

I feel very strongly about this point.

I think it is essential to get away from the conception of autonomy as the opposite of vulnerability.

We are all, permanently, autonomous and vulnerable at the same time.

The autonomous person is then the one who is able to build her or his life story by composing, WITH his vulnerability.  And I really want to emphasize the word with.

This vulnerability is no longer a stigma,  but a simple component of her or his identity.

Given my dental history, I am fully aware of the difficulties that you may encounter in moving forward, in this way with people with disabilities.

However, you intervene on what is, according to Emmanuel Lévinas, the primordial link of the recognition of the other, the face.

From a practical and professional point of view, my experience with Handident  makes me hope that it is possible for other people,  but this presumes that all the institutions surrounding the dental practitioner, bend to this new approach, which has a human and financial cost, and which therefore needs to create a collective project for society.

To conclude, I am well aware that my comments are colored by my French nationality and our French perspective.

We have our own way of doing things,  our specific relationship to disability, our model of health care system.  This implies different realities around the world,  how the COVID crisis that we are still experiencing has been managed,  but also for ordinary care.  For example, depending on every health system of our different countries, the out-of-pocket expenses for the patient are not necessarily the same,  which can have an impact on the care options offered to the patient, and on her or his expectations.

And, these expectations are changing.

I often speak of a generation that I call “the cloakroom generation”, in reference to a French series on disability with a dark sense of humor, that is filmed in the locker room of a sports center.

To me, this generation wants to participate fully, and I believe it is also reflected in the issue of care.

Patients with disabilities have different expectations, wanting care and support that listens to their specific needs and puts them at ease.

But, this generation of patients is growing up in parallel with a generation of professionals, trained in a different way, and who are looking for meaning and social impact in their professional careers and practices.

I believe that this reality can be the source of an enhancement for both the patients in listening to their expectations,  and for the professionals in the way they provide ever more adequate responses to the challenges presented to them by their patients.

I am convinced that all of this requires what I have presented to you, as a relationship of trust and humanity,  with respect, that elevates both the dentist in her or his role as caregiver, and the person as a subject of rights.  A relationship in which the person receiving care is made active as a patient in the preparation and experience of his or her care.

I would not like to conclude without specifying that, for me, the IADH concern for quality in care is part of a more global action  that perhaps gives a more significant orientation to the notion of an inclusive society.

I will base myself on the definition of the policy of Care, given by one of its initiators, Joan Tronto :

“Activity characteristic of the human species, which covers everything we do in order to maintain, perpetuate and REPAIR our world,  so that we can live in it as well as possible.

This world includes our bodies,  our people, and our environment,  all of which we seek to connect into a complex network in support of life.”

I also invite you to ask yourself the following two questions.

What partnerships should be set up with patients who are increasingly trained and have expertise in their own health conditions ?

And second, how can therapeutic patient education be introduced into the dental care environment ?  Or, how can we exchange and transfer knowledge, skills, expertise and autonomy between patients and practitioners ?

To answer these questions and many others, I would like to dare propose a collective research initiative.

Throughout my presentation, I have shared with you my experience as a patient, my expectations,  and I have outlined the main principles on which I conceive the relationship between caregiver and the person cared-for.

But I would like to go further.

First of all, I speak only for myself.  I merely represent only a small part of people with special needs,  and I believe that the experience of each and all can be useful to everyone.

Then, and this is the most important thing for me,  I am convinced that many of you have very interesting experiences and practices to offer and share.

That’s why, I would also like to suggest that you set up a research protocol which, in the first phase, would collect practices, through a very open but rigorous grid, established with IADH and expert patients.

In a second phase, this research work could serve as a basis for an international methodological and ethical guide,  that your association could adopt at a future congress, to present as a contribution to the United Nations.

Please, forgive me for this audacity.

My only justification is to commit myself to work actively on it.

I have personally initiated a reflection based on a phenomenological approach, adapted in particular by Francisco Varela, and his work in Neurophenomenology and on Buddhism.

This is to shed light on the power to act, and the conditions of autonomy and self-determination of individuals,  and the importance of the interactions they establish in particular situations.

I think that the situation of dental care presents characteristics which make it a very favorable ground to enlighten the role of the patients in a relation of care,  but also, in interactions, to enlighten the inventiveness of the teams of carers, combined in a chain of multiple co-operations.

Which may inspire the next generations, who will come after you as practitioners of special dental care specialists.  I know how much for you, as for me, learning is giving and receiving,  and sharing is caring !

I sincerely thank you for listening.  I wish you all a very good 3 day conference.

And I will now take a few questions if you want. You may ask them with a microphone, write them down through the app for the congress or email them to me or the organizers and I’ll answer them.

Philippe Aubert

 

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